Changer n'est pas facile. | Lexie.

Il avait bien vu la stagiaire qui lui faisait les yeux doux depuis deux semaines, mais il n’avait encore rien fait. Etant trop occupé par le boulot, il n’avait pas vraiment pris le temps de se poser. Donc, après avoir donné du travail à tout le monde, il se retrouvait dans son bureau, à vérifier ce qui pouvait être amélioré et prenant des notes pour en parler avec Pepper et Lexie. Ayant construit leur startup à trois, il était donc normal qu’elles aient leurs mots à dire. Surtout que niveau vêtement, elles étaient bien plus douées que lui. Mais en cet instant, la stagiaire venait de lui déposer, sur son bureau, des nouveautés. Regardant ce qu’il y avait, il en rejeta deux et se concentra sur la troisième. Malheureusement sa concentration fut de courte durée, car la jeune femme n’arrêtait pas de frôler son bras du sien, avec ce qui semblait en plus être un véritable mal de dos, vu la façon dont elle avait de se pencher pour mettre son décolleté en avant. Oh non, Carter n’était pas dupe, mais ça l’amusait de la voir essayer. Après tout, les personnes travaillant ici savaient parfaitement comment l’amadouer et ce qu’il faisait avec les stagiaires quand il en avait envie.

Carter ? Lexie est à son bureau.
Très bien, merci.

Se levant de son fauteuil, il regarda la jeune femme se redresser, mais rester face à lui. Elle souriait et elle savait parfaitement ce qu’elle faisait, alors il joua le jeu. Posant une main dans le bas de son dos, il sortit avec elle, passant devant tout le monde. Certains souriaient, d’autres levaient les yeux au ciel. Etrangement, aucune femme ne fit de commentaire, mais en même temps, celles qui étaient employées à plein temps étaient celles qui lui avaient dit non. Il gardait ces dernières car elles avaient plus de caractère que celle qu’il avait à ses côtés en cet instant. Marchant avec elle et la faisait rire, il arriva finalement près du bureau de Lexie, la saluant d’un geste de la main pour lui faire signe qu’il voulait la voir. Puis, il se pencha à l’oreille de la stagiaire pour lui dire quelques mots et cette dernière laissa sa main traîner sur son torse avant de partir en souriant. Amusé, il se tourna ensuite pour aller rejoindre son amie.

Quoi ?

Il avait remarqué la façon dont elle le regardait. Avançant un peu plus, il attendit sa réponse, avant d’expliquer le pourquoi de sa visite.

Après un shooting photo particulièrement chaotique, Lexie rentra au bureau. Elle salua au passage ses collaborateurs en leur adressant un sourire sincère. Elle demanda au passage à son assistante de ne pas la déranger sauf si c’était Carter ou Pepper, elle avait du travail en retard. Lexie s’installa sur son ordinateur, et commença à répondre a des mails, elle en avait des centaines à traiter par semaine. Elle s’occupait de toute la ligne, les collections, les matériaux, les modèles, les shooting photo. Ce qu’elle préférait c’était dessiner, mais elle n’avait pas d’autres choix que se plonger dans la paperasse au moins quelques heures par jour. Elle avait un bureau vitré qui lui permettait de voir ses équipes. Non pas qu’elle était du genre à fliquer les gens, mais elle aimait être accessible. A part, quelques rares fois comme c’était le cas aujourd’hui, tous le monde pouvait passer une tête pour discuter avec elle. Elle ne voulait pas que ses collaborateurs aient peur de la déranger et elle préférait le face à face plutôt que les mails ou les appels téléphoniques. Elle était en train de répondre à un mail lorsque son regard se porta vers la vitre, un fourmillement l’avait distraite et elle remarqua Carter avec la nouvelle stagiaire. Elle leva les yeux aux ciels. Comme à son habitude il flirtait avec la nouvelle et elle ne faisait rien pour l’en empêcher, au contraire, elle avait même l’air de le provoquer. Il s’avança vers son bureau et la gratifia d’un « quoi ? », elle avait envie de lui répondre sur un ton des plus sarcastiques « bonjour au passage », à la place elle se contenta d’un sourire et d’un tu ne peux pas t’en empêcher ? Elle se fichait pas mal des relations de Carter, du moins c’est ce qu’elle essayait de faire croire. En réalité, il avait toujours été ainsi et elle n’en avait jamais été gênée, mais une stagiaire, puis deux, puis trois et elle ne se sentait plus vraiment exister aux yeux de son meilleur ami. Pepper étant en couple depuis longtemps, il n’avait jamais joué avec elle de la façon ou il jouait avec Lexie. Il la dragouillait pour rire et elle le repoussait pour rire aussi. Car il n’y avait jamais eu la moindre attirance entre eux. Elle rêvait de fonder une famille, Carter n’était pas de ce genre, donc elle ne l’avait jamais envisagé ainsi, avant qu’il ne lui manque. Non plus comme un ami, mais comme l’homme le plus important de sa vie dans ses relations amicales.

L’ingénieur informatique était du genre à aimer s’amuser. Après tout, on n’avait qu’une vie ! Malgré les réflexions des femmes de sa famille, non il n’était pas prêt à fonder une famille. Enfin, c’était ce qu’il disait quand sa mère lui disait, pour la énième fois, qu’elle voulait des petits enfants. Il préférait couper court à la cette conversation sous peine de l’entendre en parler pendant des heures. A chaque fois, il répond qu’il préfère s’amuser ou alors qu’il a deux sœurs, mais que elles bizarrement on ne leur dit jamais rien. Après tout il avait une jumelle, ils avaient logiquement le même âge. Elle non plus n’avait pas d’enfants, donc qu’on l’embête aussi. Il devait malgré tout reconnaître que faire fuir les prétendants de sa jumelle et de leur petite sœur n’était peut-être pas la chose à faire pour qu’elles finissent en couple. Mais ça l’amusait. C’était plus fort que lui. Pour le moment en tout cas, il se faisait draguer ouvertement par la stagiaire et il de ça aussi il s’en amusait. L’amenant avec lui jusque près du bureau de Lexie, le jeune homme finit par lui dire qu’il allait rejoindre son amie et il sentit la main de la stagiaire glisser contre son torse. Oh il allait s’amuser avec elle, il le sentait. Allant voir la styliste, il lui demanda simplement pourquoi elle le regardait ainsi.

Ca n’est pas de ma faute si elles sont toutes à mes pieds.

Un sourire charmeur aux lèvres, il s’installa dans un fauteuil face au bureau.

Comment vas-tu ? J’ai entendu dire que le shooting n’a pas été agréable.

Il pesait ses mots, parce qu’apparemment ça avait été pire que ça, mais il ne voulait pas être celui qui appuyait là où ça faisait mal.

Lexie se passa une main sur la nuque, la journée était loin d’être terminée pour elle. Elle avait beaucoup de mail à traiter et son assistance lui avait laissée quelques notes, elle avait donc des coups de fil à passer également. Cette histoire de shooting raté, lui avait fait perdre deux heures sur son emploi du temps et elle qui avait promis à sa petite sœur de diner avec elle, se rendait bien compte qu’elle ne pourrait honorer sa promesse. Elle tapa donc un rapide texto à sa petite sœur pour le lui faire savoir. Elle leva les yeux aux ciels en entendant la remarque de Carter. Excuse-nous don juan. Elle sourit. Il avait le don de la faire rire, et de la détendre instantanément. C’était sans doute pour cela qu’ils étaient si amis. Carter, c’était le genre de mec à te faire oublier tes soucis et à relativiser en toute circonstance. Il avait ce petit côté frais, dont elle avait précisément besoin à cet instant. Il aborda le sujet qui fâche, justement ce qui l’avais mise en retard. Une catastrophe, je n’ai jamais vu si peu d’alchimie entre deux personnes. En plus, le gars avait l’air complètement mort de la veille. Il avait du sortir, on a du le sur maquiller pour effacer les traces d’une soirée trop arrosé et le rendu n’était pas du tout naturel. J’ai fini par dire stop, qu’on referait un shooting demain. Je lui ai passé un sacré savon. Autant te dire que si demain il me refait le coup, je le vire. Elle sourit à nouveau. Elle n’était pas méchante, elle était plutôt du genre conciliante. Mais dans le boulot, mieux valait de ne pas trop la chercher. Elle se montrait souvent très, voir trop, exigeante. Et toi, ça va ? Je veux dire de manière générale ? Elle plongea son regard dans celui de Carter. Depuis le démarrage de la startup, ils parlaient très souvent boulot et finalement, ils ne se parlaient plus vraiment de leur vie personnel. De plus, ils se voyaient quasiment systématique avec Pepper maintenant et ne partageaient plus de moment rien qu’à deux.

Amusé par la remarque de son ami, il devait avouer qu’il aimait bien ce genre de surnom. Encore plus quand ça venait de ses amies. Mais il reprit son sérieux, parce qu’il avait entendu dire que le shooting qui avait eu lieu avait été un désastre et il voulait s’assurer qu’elle allait bien. Ecoutant ce qu’elle avait à en dire, il grimaça. Il comprenait en effet pourquoi ça ne s’était pas bien déroulé et le fait qu’elle soit si énervée. Oh, il avait déjà entendu son amie râlée parce qu’un mannequin n’était pas en forme, mais en général, en face la personne faisait des efforts. Là apparemment ça n’était pas du tout le cas, ce qui était bien dommage. Mais Lexie avait raison, si le modèle arrivait dans le même état le lendemain, elle aurait raison de le virer.

Si tu as besoin d’aide, n’hésites pas à demander.

Esquissant un sourire, il serait prêt à aller voir lui-même celui qui troublait le travail de la styliste pour le mettre dehors. A la question de son amie, il haussa les épaules.

Ca va plutôt bien.

Pas grand-chose de nouveau à vrai dire. Toujours le travail, parfois garder le fils de Pepper et souvent s’amuser. Mais ça n’était sans doute pas la chose à dire en cet instant.

J’attend de voir si mon service comprend ce que je leur demande de faire et pour le moment ça semble être le cas. Mais comme tu as pû le constater, certains en font plus que ce que je leur demande.

Lui faisant un clin d’œil, il attrapa un stylo pour jouer avec.

A part ça rien de nouveau. C’est toujours le même train-train.

Haussant les épaules à nouveau, il se redressa en pensant à une chose.

Ah si, ma mère a décidé de me présenter à la fille d’une de ses amies. Apparemment elle serait célibataire, jolie, bien sous tous rapports. Donc un bon partie pour moi, mais comme d’habitude, ça finira soit par elle ne me trouvant pas à son goût, ou alors juste une partie de jambes en l’air ou elle sera lesbienne.

C’était souvent les choix qui s’offraient à lui, il devait bien l’avouer et il en avait eu au fil des mois.

Et toi comment vas-tu ? Ta famille se porte bien ?

Elle acquiesça d’un signe de tête. Globalement, tout le monde faisait bien son boulot et le shooting chaotique du matin, était, du moins elle l’espérait, un cas isolé. C’est gentil, mais je devrais pouvoir me débrouiller. Carter, savait qu’elle avait été plusieurs fois championne de boxe, il aimait la taquiner à ce sujet d’ailleurs. Les gens étaient souvent étonnés de voir que ce petit bout de femme pouvait se battre, et bien qui plus est. Elle laissa son ami s’installer face à elle et prendre un stylo dans son pot à crayon, elle le regarda quelques secondes jouer avec ce dernier avant de relever la tête, elle ria de sa plaisanterie sur la nouvelle stagiaire. Sérieux, je ne sais pas ce que tu leur fais pour qu’elles tombent toutes comme ça. Je veux dire tu as dix ans de plus qu’elle … Soit elles sont stupides, soit elles pensent que tu pourras les embaucher. Lexie secoua la tête. C’était toujours la même rengaine. Carter qui joue de son charme et toutes les petites nouvelles qui tombent comme des mouches. A tel point, que pour Pepper et elle, c’est devenu un mode de sélection dans le recrutement. Aucune des filles embauchées au sein de la startup n’avaient couchées avec lui. Du moins, c’est ce qu’elles pensaient, après tout avec Carter, elles n’étaient jamais au bout de leurs surprises. Finalement Carter tombait à pic. Elle avait justement besoin de se divertir et quoi de mieux que la vie sentimentale de monsieur Walton ? Elle connaissait plutôt bien la famille de ce dernier et elle imaginait non-sens mal, sa mère essayé de le caser à tout prix. En même temps, si tu ne te comportais pas comme un con, tu serais casé depuis longtemps Carter ! Elle lui sourit à nouveau. C’est pas comme-ci tu laissais réellement une chance aux filles d’entrer dans ta vie. Elle se retint d’en dire plus, après tout qui était-elle pour le juger ? Elle faisait exactement la même chose. Elle était incapable de garder un homme, elle fuyait dès que ça devenait trop sérieux, elle aussi avait un problème avec l’engagement, elle avait toujours peur que ça tourne mal donc elle refusait catégoriquement de s’attacher. Sans surprise, il lui retourna la question. Ça va. En réalité, c’était pas le top, mais elle faisait avec. La cohabitation avec ma petite-sœur se passe pas trop mal, c’est le principal. En réalité, elle appréhendais un peu la semaine qui suivrait. C’était l’anniversaire de la mort de sa mère. Ça ferait déjà 23 ans qu’elle serait morte. Pourtant, la blessure était toujours ouverte.

Hochant la tête à sa réponse, il n’insista pas. Il savait qu’elle pouvait se débrouiller seule, mais si elle avait besoin, elle saurait où le trouver. Venant s’installer, il piqua un crayon pour jouer avec, avant de répondre aux questions de son amie et évidemment faire une remarque sur la scène qui s’était jouée juste avant. En l’écoutant parler, il se pointa du doigt.

Tu as vu ce visage ? C’est comme ça qu’elles tombent sous le charme.

Haussant les sourcils de façon suggestive, il se mit à rire légèrement, amusé par sa propre bêtise, avant de reprendre la parole.

Certaines pensent que coucher avec moi les aidera, mais certaines sont là justes pour le sexe. Quelque chose par ça n’est pas dérangeant, mais j’avoue que de servir de chose comment à être lassant.

Même s’il le montrait pas, il en avait parfois marre d’être pris juste pour celui qui couche avec tout le monde. Indiquant finalement que les femmes de sa famille voulaient encore et toujours le caser, il prit un air offusqué aux paroles de la styliste.

Quelle vulgarité ! Je te signale que je laisse les femmes entrer dans ma vie, regarder Pepper et toi.

Pour lui c’était une preuve suffisante de ses efforts. Finalement, il lui retourna la question pour savoir si elle aussi allait bien, ainsi que sa famille.

Si elle te supporte, en effet ça se passe bien.

Esquissant un sourire, il lui fit un clin d’œil, avant de s’installer mieux dans son fauteuil.

Maintenant, dis-moi la vérité. Comment vas-tu vraiment ? Je te connais depuis longtemps Lexie et quelque chose cloche, je le vois.

Il ne savait pas ce que c’était, mais il la connaissait assez pour savoir qu’en effet quelque chose n’allait pas et s’il pouvait aider, il le ferait.